La démarche intellectuelle d'Épicure n'est pas sans nous rappeler celle du stoïcisme : il constate que, si tous les hommes aspirent au bonheur, le spectacle de ses contemporains montre au contraire qu'ils sont en permanence insatisfaits, dans la plainte.
Afin de soigner ces maux dont les hommes souffrent, il est donc nécessaire d'établir d'abord un diagnostic (quelles sont les causes précises de leurs souffrances ?) de manière à déterminer ensuite un remède (pharmakon, en grec, dont est issu le terme de "pharmacie").
La science constitue, méthodologiquement, un des aspects du remède : en apportant une explication rationnelle, en expliquant les phénomènes naturels par des causes naturelles, elle permet de déjouer les terreurs causées par la superstition religieuse. Les deux premières lettres d'Épicure qui sont parvenues jusqu'à nous remplissent cette fonction explicative.
En ce sens, la science importe moins en elle-même, que pour ses effets éthiques. Le seul véritable problème de l'existence est : comment parvenir à être heureux ? Aussi le bonheur est-il bien, dans la perspective d’Épicure, le Souverain Bien, et la Lettre à Ménécée va montrer non seulement qu’il est accessible, mais surtout, comment il l’est.
La raison d'être de la philosophie, c'est donc de rendre ce bonheur possible, en déjouant tout ce qui lui fait obstacle. L'école philosophique que fonde Épicure (le Jardin) est ainsi moins une école au sens moderne du terme (un lieu où acquérir des savoirs) qu'une école de vie où cultiver entre soi, et surtout où mettre en application, les remèdes aux maux qui détournent d'être heureux. La philosophie, telle que l'entend Épicure, ne s'apprend pas comme une série de connaissances, mais se pratique, met en application, comme un art de vivre heureux.
Être heureux, c'est donc déjouer tout ce qui fait obstacle au bonheur, autrement dit tout ce qui concourt à notre malheur. Or deux types de souffrances perturbent les hommes : les souffrances du corps et celles de l'âme.
C'est pourquoi le bonheur se définit essentiellement comme leur suppression, soit : parvenir à l'ataraxie (absence de trouble de l'âme) et l'aponie (absence de trouble du corps), en dispensant le tetrapharmakos (quadruple remède) en quoi consiste la Lettre.
La pratique de la philosophie ayant pour but d'y parvenir, il apparaît donc que selon Épicure le bonheur dépend de nous, et non des circonstances. Alors que son étymologie laisserait croire qu'il est affaire de hasard favorable (bon-heur), le bonheur tel qu'Épicure le conçoit est en réalité l'affaire de chacun : comment faire, en toute circonstance, même néfaste, pour être néanmoins heureux ? Voilà la question implicite à laquelle cette lettre répond.
Question :
À ce stade, quelles similitudes, et quelles différences constatez-vous avec la démarche stoïcienne ?
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